L’innovation et les perspectives en matière de politique sur l’accessibilité en France et sur le territoire régional

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Conférence 1 avec Carole Guéchi

La politique d’accessibilité s’inscrit dans une politique plus large, interministérielle, celle du handicap qui s’inscrit elle-même dans une dimension internationale et européenne.

L’accessibilité est l’affaire de tous. Les acteurs de l’accessibilité sont présents à tous les niveaux et agissent au quotidien à la construction d’une société chaque jour plus inclusive. L’accessibilité de la chaîne du déplacement est au cœur des enjeux des ministères de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, lesquels sont en charge des politiques publiques permettant d’assurer la continuité et l’accessibilité, de la chaîne des déplacements. Dans ce cadre, ils pilotent le dispositif des agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP) pour le cadre bâti et des schémas directeurs d’accessibilité (SD’AP) pour les transports. C’est l’outil créé par l’ordonnance du 26 septembre 2014 pour faire suite à la concertation de l’hiver 2013-2014, pour traduire l’engagement des acteurs publics et privés et rendre la société accessible à tous dans des délais resserrés et réalistes.

L’accessibilité, cela concerne toutes les étapes de la vie des hommes et des femmes. Ce sont les déplacements, l’éducation, le logement,
la santé, le travail, les activités culturelles, les loisirs et aussi l’accessibilité numérique.
L’accessibilité doit être en adéquation avec la vie des gens. C’est quelque chose qui, exige de la co-construction. Malheureusement, cette pratique du retour d’expérience, sur le partage de bonnes pratiques n’est pas suffisamment développée. Nous constatons encore un déficit de sensibilisation et de formation des citoyens aux problématiques et aux besoins spécifiques des personnes en situation de handicap. Et c’est sans doute aujourd’hui ce qui retarde une réalité vraie de l’accessibilité.
Vous le constatez comme moi. Il y a énormément de projets, de biens, d’équipements, de services qui se créent, et dont l’accessibilité n’est pas satisfaisante.

Elle est parfois réglementaire, mais est-elle fonctionnelle ? La loi ne fait pas tout.

Elle ne fera jamais tout. Les échanges que l’on pourra avoir entre les professionnels et les bénéficiaires, au regard de l’usage, c’est indispensable. L’accessibilité, ne sert pas uniquement aux personnes en situation de handicap. Le cercle des personnes qui en bénéficient est beaucoup plus vaste. Déjà, nous devons prendre en compte les seniors. Un habitant sur cinq est âgé de plus de 60 ans en France, et en 2040, ce sera un sur quatre. Il faut refuser que l’on dise que l’accessibilité ne bénéficie qu’à un petit nombre, et la conséquence immédiate est :

« L’accessibilité coûte cher pour peu de monde. » Il faut lutter contre ces idées reçues.

En matière de bilan, si l’on fait un point, le 1er principe qu’il faut intégrer pour comprendre où nous en sommes est que l’accessibilité est une remise en question permanente, dans une société qui innove, qui évolue et se transforme.
Depuis la loi de 2005, depuis les agendas d’accessibilité programmée, un million d’ERP, à peu près la moitié, sont déclarés accessibles. Au minimum, ils sont entrés dans une démarche d’accessibilité, ils ont fait des travaux et ils ont fait une mise en conformité. Ce n’est peut-être pas parfait, mais des avancées sont constatées.
Il y a donc à peu près 1 million D’ERP qui n’ont rien fait. On constate essentiellement que les plus petites structures ne sont pas forcément au rendez-vous. Dans les établissements de l’État recevant du public, 70 % ont réalisés une démarche aboutie ou non. Ce sont l’Éducation Nationale, l’Agriculture et la Culture qui sont « les bons élèves ».

Cela pose malheureusement un problème pour la vie quotidienne de toutes les personnes en situation de handicap et pour beaucoup d’autres personnes. Dans les transports, grâce aux Ad’AP ferroviaires, nous avons considérablement avancé. Il y a énormément de programmes d’accessibilités qui sont lancés un peu partout.
C’est long, c’est lourd, c’est coûteux. Ça prend en moyenne deux à trois ans de travaux en plus, mais c’est quelque chose qui avance. Ceci est la traduction des engagements qui avaient été pris dans le cadre des Ad’AP même si on ne sera pas au rendez-vous en 2024. En ce qui concerne la voirie et les arrêts urbains, c’est là que nous sommes les moins bons.

Quand on regarde au niveau des interurbains, le chiffre chute entre 15 et 30 %. Ce n’est vraiment pas satisfaisant. Après 15 ans. La marche est encore haute.

Nous n’avons , comme support, que la loi de 2005. « Tout nouveau service doit être accessible. » C’est tout. Techniquement, il n’y a rien. Comment faire, alors qu’il y a des collectivités qui sont déjà lancées dans des appels d’offres, dans des projets, dans des écritures de cahier des charges et qui veulent s’engager dans des projets innovants (Ex. Le téléphérique). Il n’est pas question de remettre en cause ces projets, mais comment peut-on faire en sorte qu’ils intègrent l’accessibilité alors qu’il n’existe aucune règle ?
Lorsque l’on est transporteur, fabricant, constructeur, aménageur et que l’on a une entreprise à faire tourner, les priorités, ce sont surtout les coûts, les délais, la performance économique. Pour cela, on se focalise sur ces objectifs : les problèmes techniques, les réglementations, les dossiers administratifs, la gestion des équipes, la sécurité, le rendement, la marge, etc.

Seulement 50 à 70 % des arrêts urbains prioritaires qui sont accessibles.

Quand on a passé 1000 heures sur un projet dans une entreprise, combien de temps a-t-on mis à écouter l’utilisateur final, quel qu’il soit, valide ou avec des besoins spécifiques ?
Il n’est pas suffisamment écouté. Il faut, pour être efficace, co-construire les solutions avec les associations, consulter les usagers finaux, promouvoir l’accessibilité pratique, avec des solutions de bon sens. Autre avantage constaté de la co-construction, on arrive à trouver des solutions qui complètent la réglementation. Il ne s’agit pas de balayer la réglementation, mais éventuellement de l’adapter, de la compléter intelligemment au plus près des besoins des personnes.

Cela augmente la valeur sociale du produit ou du service. Il faut penser l’accessibilité en terme de qualité d’usage et s’inscrire dans une démarche constructive d’amélioration continue, parce que la société ne s’arrête pas d’innover. La transition qu’il faut opérer aujourd’hui, c’est du « pouvoir accueillir » au « vouloir accueillir ».

La question que je me pose : et l’utilisateur dans tout ça ?

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